Friday, February 24, 2006

VAE : un danger pour le métier d’éducateur ?

La mise en place de la validation des acquis de l’expérience dans le champ de l’éducation spécialisée, s’est réalisée dans une belle unanimité. En effet, chaque éducateur pouvait constater qu’autour de lui, il y avait un certain nombre de collègues, très compétents, travaillant depuis longtemps sans pourtant qu’il aient de diplômes (et donc de salaire) à leur mesure. Pour eux, ce dispositif constitue une chance, très intéressante, d’évolution dans leur carrière.

La VAE est la quatrième et dernière en date des voies d'accès aux diplômes, d’éducateur spécialisé délivrés en France après la formation initiale, l'apprentissage et la formation professionnelle. Introduite par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, elle s'est substituée à la validation des acquis professionnels, avec pour objectifs de toucher de nouveaux bénéficiaires et de simplifier les procédures.

Or, après deux années de fonctionnement le nombre de candidats ayant obtenu leur diplôme par la voie de la VAE atteint dans certaines académies celui de ceux qui l’ont obtenu par les autres filières. Ainsi selon le rectorat de Marseille, ce sont près de 250 candidats qui ont obtenu le DEES par la voie de la VAE au cours de l’année 2005 dans cette académie.

Cet éclatant succès de la VAE est peut être un feu de paille, mais on peu en douter. En effet, il est soutenu par le nombre très important de ceux que le ministère nomme « faisant fonction ». Cette curiosité ethnologique de notre profession n’est pas vraiment nouvelle. Dans de très nombreuses équipes, les ME AMP et ES travaillent ensemble. Très souvent, les AMP et ME peuvent très légitimement penser qu’ils font les mêmes tâches que les ES. Si les fiches de postes officielles font bien ressortir des écarts dans les taches à effectuer, elles relèvent souvent de la nuance et sont nivelées dans la pratique où la compétence réelle se mesure aussi avec d’autres critères que le seul diplôme.

Cette situation, va devenir rapidement ubuesque sous l’effet de la VAE. En effet les Moniteurs éducateurs et AMP qui estiment à bon droit tenir des fonctions très similaires à leurs collègues ES, ont maintenant un moyen d’accéder au diplôme d’éducateur spécialisé. Toutefois, le nombre de postes n’évolue pas forcément et d’ici peu certaines équipes seront composés d’éducateurs spécialisés ayant une fonction (et une paye) en rapport avec leur diplôme et d’autres restés sur leur ancien poste de Moniteur Educateur ou d’AMP.

En prenant en compte le fait qu’il y aura, dans les prochaines années plus d’éducateurs que d’habitude qui doivent partir à la retraite en raison de l’excroissance démographique du baby-boom, alors il est possible de prévoir une migration de ces nouveaux éducateurs sur les postes qui se libèrent.

Et c’est là que se situe la véritable difficulté. En effet la VAE valide une expérience mais les pratiques sont tellement dissemblables selon qu’on travaille dans le milieu du handicap adulte ou de la protection de l’enfance qu’on peu fortement douter que des passerelles soient facilement envisageables.

Ainsi une personne, AMP de formation initiale qui aurait une quinzaine d’années d’ancienneté dans un foyer d’accueil pour personnes adultes handicapées profonds, peut prétendre à la VAE et obtenir, très légitimement le diplôme en développant plusieurs situations éducatives issues de son milieu de travail. Mais quelle idée aurait cette personne, nouvellement diplômée du dispositif français de protection de l’enfance ? Pas la moindre ! ou alors si elle a pu s’y intéresser personnellement. Rien dans le dispositif de validation ne vient interroger sa connaissance des autres champs d’intervention des éducateurs spécialisés. Et pourtant, une fois diplômée elle pourra postuler en AEMO judiciaire ! Bien entendu une personne ayant obtenue son diplôme par le biais de son expérience en maison d’enfants à caractère social, n’aura pas, non plus forcément, de connaissances du milieu du handicap.

En effet, lorsqu’on lit le référentiel professionnel du métier d’éducateur spécialisé, dans chaque fonction, on appelle l’éducateur à prendre en compte l’environnement extérieur, le contexte. Par exemple, dans la première fonction, on annonce que l’éducateur « réunit et synthétise informations et documents (techniques, juridiques, sociologiques médicaux, psychologiques, scolaires, judiciaires, administratifs, financiers...) en prévision des dispositions à prendre sur le plan éducatif et aussi sur le plan matériel. » Mais ces ouvertures se limitent à l’environnement immédiat de l’établissement, et ne concernent pas les autres champs d’intervention de l’éducateur spécialisé.

Ceux qui verraient dans cette critique une réaction corporatiste se tromperaient, car la VAE est surtout un révélateur de certaines incohérences de notre métier. Est il normal qu’il n’existe pas plus d’écart entre les différentes fonctions ? (ce qui permet au passage de déqualifier les postes en période d’austérité budgétaire). Les éducateurs savent ils défendre leurs savoirs faire et leurs compétences ? La seule imprégnation dans le milieu professionnel suffit elle à former des éducateurs ?

Il y a aussi un parallèle qui devient de plus en plus troublant entre l’extension de cette voie d’accès si peu chère au diplôme et les difficultés financières de certaines écoles (Parmentier à paris, Pau …). Cela faisait longtemps que l’on avait pas vu les instituts de formations se confronter à de telles difficultés. Des licenciements de formateurs pour raison économique deviennent monnaie courantes et la question du prix de la formation par étudiant est de plus en plus mise en avant pour chercher à réduire les coûts.

Ces questions, finalement assez inconfortables pour les éducateurs eux mêmes, appellent à une remise à plat des différents diplômes et de leurs articulations. Elles appellent également à un très fort renforcement de l’accompagnement et du soutien des éducateurs s’étant engagés dans cette démarche.

Tuesday, February 21, 2006

l'évaluation dans le travail éducatif

Depuis de nombreuses années, l'évaluation du travail social prend une place toujours plus grande, ce qui, au final, gêne beaucoup les éducateurs.

En effet, nous avons beau jeu, maintenant, de stigmatiser l'idéologie scientiste et managériale qui sous tends beaucoups de projets d'évaluation actuelle. Mais c'est à nous (collectivement) que nous devons cette situation. En effet, l'idéologie dominante des éducateurs, depuis très longtemps n'a retenu que la partie clinique du mot. Maurice Capul et Michel Lemay expliquent bien dans leurs livre, de l'éducation spécialisée, comment l'évaluation s'appliquait aux enfant dont on cherchait à cerner les difficultés. Par contre, l'idée d'évaluer les pratiques n'est apparue qu'avec la décentralisation et l'interrogation, légitime, des financeurs sur l'efficacité des actions.
Cette pression n'a fait que croître depuis les années 80, et nous n'avons pas su faire autrement que nous positionner en opposition, en résistance, plutôt que de chercher à utiliser l'évaluation pour rendre plus claire et lisible notre travail.

Car il faut bien reconnaître que vu de l'extérieur, le fonctionnement d'une institution éducative est particulièrement opaque. On ne sait pas forcément à qui s'adresser, on n'a pas facilement de réponses lorsqu'on a une question au sujet d'un enfant...etc. J'ai pu le constater (avec une certaine surprise d'ailleurs) lorsque j'ai quitté les institutions éducatives pour le milieu ouvert.

Nous vivons donc, avec la réforme de la loi de 75 (loi du 2 janvier 2002, et loi du 12 février 2005) l'aboutissement de cet affrontement idéologique qui dure depuis pas mal de temps... et nous perdons! Ou plutôt, nous courons un risque très important. En effet, nous risquons que la rage évaluative emporte tout sur son passage et nous oblige à tenter de tout évaluer, même ce qui ne doit surtout pas être évalué. Par exemple, lorsqu'on cherche à savoir ce qui se passe vraiment, ce qui est dit, ce qui est fait... dans une équipe d'éducateurs on court le risque de démolir leur autorité. Lorsque l'évaluation devient suspicion, alors on attaque clairement la fonction de l'éducateur et on l'empêche de faire son travail. Or nous n'en sommes plus très loin!

C'est souvent sur ce qui convient de faire que les divergences apparaissent. Pour ma part, je pense qu'il faut prendre à bras le corps cette question de l'évaluation. Nous devons être les maîtres d'oeuvres de nos propres techniques d'évaluation et produire des écrits, éclairant nos pratiques et expliquant au financeur qu'il y a certaines zones auxquelles il n'aura pas accès. C'est seulement de cette manière que nous pourrons éviter que des règles venant de l'extérieur nous soit imposées.

Monday, February 13, 2006

début du blog

C'est partit, il faut bien commencer par un bout! Alors que dire sinon que ce début , cet écran blanc me rappelle un livre "du vide et de la création" de michel cassé.

La pratique éducative est faite de plein. Le plein du quotidien où chaque instant est marqué par les rituels institutionnels et la demande, foisonnante des personnes habitant l'institution.

Ce vide de la page (écran) blanche permet de laisser une trace au presque rien et au n'importe quoi pour le quotidien fasse trace et expérience.

C'est au moins l'idée....